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Un pas en avant, deux pas en arrière

Traduction italien anglais
À trop vouloir traduire, on en finit parfois par perdre la tête. La Commission générale de terminologie et de néologie, qui se charge de traduire en bon français bien de chez nous le vocabulaire de l’informatique et de l’internet, en est une bonne illustration. Comme le dit avec ironie le journaliste Marc Rees sur le site NextInpact.com, « chacun est invité à [l’]adopter, la Marseillaise dans les oreilles, baguette sous le bras. » Mais il se trouve que ce travail n’est pas toujours fait à bon escient. Prenons le cas du « lurker« , c’est-à-dire d’une « personne qui, dans un espace d’échanges de l’internet tel qu’un forum ou un blogue, suit les discussions ou consulte les articles sans apporter de contribution ». Elle devient un « fureteur » (ou une « fureteuse ») ; on a affaire ici à une traduction certes assez élégante, mais qui ne restitue pas forcément la connotation passive du verbe « to lurk« . En français, « fureter » aura en effet plutôt une connotation active (« Fouiller, chercher partout avec soin, curiosité ; s’empresser à savoir des nouvelles de tout, chercher à satisfaire sa curiosité sur tout »). Mais cette légère nuance reste au final assez inoffensive.

Penchons-nous sur le cas du mot « thumbnail ». Une traduction parfaitement valable et communément admise longtemps le transforme en « vignette ». La Commission susnommée recommande désormais l’usage du mot « imagette ». Combien d’argent public a-t-on dépensé pour réinventer la roue ? Idem pour le « blog », qui après avoir été un « bloc » en 2005, devient un « blogue ».

Heureusement que ce lot de traductions comporte aussi des conversions de bon aloi (« electronic paper/ink » en « papier/encre électronique » par exemple), car à chaque fournée, la polémique repart de plus belle et, hélas, souvent à juste titre.

Chaque rentrée amène son lot de grincements de dents : dans les écoles, les bureaux, les ateliers… et dans mes oreilles, quand j’entends les nouveaux anglicismes, mâtinés de barbarismes, employés dans les médias. Jeudi dernier, rien qu’en une heure, j’en ai entendu deux qui ont saboté ma rentrée : « smartainment » et « ever ».

Commençons par « smartainment », contraction de « smart » (intelligent, élégant) et « entertainement » (divertissement), ou comment faire du divertissement dont les CSP+ peuvent parler sans avoir honte. Fini le divertissement populaire : il faut que l’élite de la nation puisse se lâcher devant sa télévision sans se départir de son prestige, et tant pis si c’est devant les mêmes programmes que la ménagère de moins de 50 ans. Qui dit changement de chaîne, dit changement de standing.

Évoquons ensuite « ever ». En anglais, on utilise, entre autres, ce mot pour exprimer une notion d’absolu : « the most beautiful man she has ever seen », soit « le plus bel homme qu’elle ait jamais vu ». Je l’ai entendu dans cette acception… mais en plein milieu d’une phrase en français.

Si le premier était clairement revendiqué, je l’ai retrouvé sur des sites spécialisés, le second m’a semblé involontaire, bien que résultant sans doute d’un snobisme anglomaniaque en vogue dans ces milieux. Mais dans les deux cas, il va sans dire que mon sang n’a fait qu’un tour et a renforcé mon aversion pour la télévision et ses grosses légumes…

Article proposé par Autrement-Dit Traduction italien assermentée


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